Selon le rapport annuel 2018 du Défenseur des Droits, le handicap est la première cause de discrimination dans l’obtention d’un l’emploi. Une personne en situation de handicap a trois fois moins de chances que la moyenne d’obtenir un emploi (35% des personnes handicapées ont un emploi) et est deux fois plus exposée au chômage (19% pour les personnes handicapées contre 9% pour le reste de la population). Elles rencontrent de fortes difficultés pour accéder à l’emploi et s’y maintenir. Le taux d’emploi direct dans le secteur privé est de 3.5%, loin de l’objectif des 6%.
C’est dans ce contexte que la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » modifie l’obligation des entreprises en matière d’emploi des travailleurs handicapés. Cette réforme vise à encourager et à valoriser l’emploi de ces derniers sous toutes ses formes. En effet, tous types d’emploi seront pris en compte et le recours à la sous-traitance continue à être valorisé sous forme de déduction à la contribution des entreprises.
Quels sont les nouvelles obligations pour les entreprises en 2020 ? Quels impacts pour les entreprises clientes des salariés portés ? Quels sont les avantages du portage salarial pour les travailleurs en situation de handicap ?
Quelles nouvelles obligations en 2020 ?
A compter du 1er janvier 2020, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, doivent déclarer le nombre de travailleurs handicapés via la Déclaration Sociale Nominative (DSN). Auparavant, l’obligation concernait uniquement les entreprises à partir de 20 salariés. De plus, le décompte de salariés est désormais réalisé au niveau de l’entreprise et non plus au niveau de l’établissement. Toutefois, seules les entreprises de 20 salariés et plus seront assujetties à l’obligation d’emploi de 6% de travailleurs handicapés et devront verser une contribution à l’AGEFIPH si elles n’atteignent pas cet objectif.
Comment est calculée la contribution à l’AGEFIPH ?
Le nombre de BOETH manquant correspond à l’écart entre le nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi devant être employés et le nombre de ceux effectivement employés par l’entreprise.
La contribution annuelle à l’AGEFIPH, avant déduction, est égale au produit du nombre BOETH manquants multiplié par :
- 400 fois le Smic horaire pour les entreprises de 20 à 249 salariés
- 500 fois le Smic horaire pour les entreprises de 250 à 749 salariés
- 600 fois le Smic horaire pour les entreprises à partir de 750 salariés.
Pour les entreprises n’ayant employé pendant 4 ans aucun travailleur indépendant ou conclu de contrats de fournitures, de sous-traitance ou de services d’un montant supérieur à 600 fois le Smic horaire brut, le montant à retenir est de 1 500 fois le Smic horaire, quel que soit le nombre de salariés employés au sein de l’entreprise.
Les leviers et actions valorisées
A partir de 2020, toutes les formes d’emploi sont prises en compte pour atteindre le taux d’emploi de 6% : les CDD, les CDI, les contrats d’alternance, les parcours emploi compétences (PEC), les contrats d’intermittents, les contras de mise à disposition d’une entreprise par une entreprise de travail temporaire ou par un groupement d’employeurs, les stages rémunérés ou non et les périodes de mise en situation professionnel.
D’autres actions peuvent être valorisées dans le cadre de l’obligation d’emploi. L’entreprise peut déduire du montant de la contribution annuelle dans la limite de 10% les trois types de dépenses directes suivantes :
- La réalisation de travaux favorisant l’accessibilité des locaux de l’entreprise aux travailleurs handicapés.
- La mise en œuvre de moyens humains, techniques ou organisationnels compensatoires au handicap pour le maintien dans l’emploi ou pour la reconversion professionnelle de salariés handicapés.
- Le coût d’actions de formation, de sensibilisation des salariés et de prestation d’accompagnement de travailleurs handicapés assurées par des organismes extérieurs à l’entreprise.
De plus, l’achat de produits ou de services auprès d’un ESAT (établissement et service d’aide par le travail), d’une entreprise adaptée ou d’un travailleur indépendant est également valorisé à hauteur de 30% du prix hors taxes après déduction des coûts de matières premières, des produits, des matériaux et de la sous-traitance.
L’ordonnance publiée au Journal officiel du 22/08/2019 complète cette valorisation et indique que peuvent être déduites du montant de la contribution annuelle les dépenses supportées directement par l’entreprise pour des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services qu’elle passe avec des entreprises de portage salarial lorsque le salarié porté est reconnu bénéficiaire de l’obligation d’emploi au sens de l’article L.5212-13.
AGEFIPH, le portage salarial est déductible
Les entreprises qui font appel à des travailleurs handicapés (TH) portés par une entreprise de portage salarial peuvent, dès le 1er janvier 2020, bénéficier de la déduction de la contribution annuelle auprès de l’AGEFIPH.
Les modalités de calcul sont simplifiées grâce à l’application d’un taux unique quel que soit le type d’achat. La limite est de 30% du coût de la prestation et la déduction est opérée dans la limite de 50% du montant de la contribution si l’entreprise possède un taux d’emploi TH inférieur à 3%. Si le taux d’emploi de personnes handicapées de l’entreprise est d’au moins 3%, la limite atteint 75% du montant de la contribution.
La loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » et en particulier l’ordonnance publiée au Journal officiel du 22/08/2019 affirme que le dispositif du portage salarial est un levier important pour la réinsertion des travailleurs handicapés.
L’attestation à obtenir auprès de l’entreprise de portage salarial
L’arrêté du 19 novembre 2020 fixe le modèle d’attestation relative aux achats auprès des entreprises de portage salarial lorsque le salarié porté est reconnu bénéficiaire de l’obligation d’emploi au sens de l’article L.5212-13.
L’attestation doit être émise par la société de portage salarial aux clients, au plus tard le 31 janvier 2021 pour les dépenses de l’année 2020.
L’entreprise de portage salarial indique le montant qui peut être valorisé par l’entreprise cliente, en déduction de la contribution due au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, dans le cadre de la déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés effectuée au titre de l’année civile.
Ainsi, l’attestation doit comporter :
- Montant 1 : Le montant du prix hors taxes des fournitures, travaux ou prestations effectivement réglé au cours de l’année ;
- Montant 2 : Les coûts de matières premières, des produits, des matériaux, de la sous-traitance, des consommations intermédiaires et des frais de vente et de commercialisation payées dans l’année écoulée, correspondant aux montants réglés visés dans le cadre du Montant 1 (pour le portage salarial, il s’agit des frais de gestion, achat de sous-traitance et tout autre frais) ;
- Montant 3 : Le montant du coût total de la main d’œuvre qui correspond à la différence entre le Montant 1 et le Montant 2 ;
- Montant 4 : Le montant à valoriser dans le cadre de la déduction avant plafonnement. Le montant à valoriser est égal au Montant 3 x 30%.
Le Portage salarial, une solution adaptée aux travailleurs en situation de handicap
Avec cette réforme, la sous-traitance par le biais du portage salarial est désormais encouragée car elle permet aux entreprises clientes de bénéficier de déductions et aux travailleurs indépendants en situation de handicap d’avoir un accès plus aisé au marché de l’emploi.
Si le travailleur possède les compétences nécessaires pour proposer ses services, il lui devient alors plus simple de trouver des missions plutôt qu’un contrat de travail. Grâce au portage salarial, le travailleur en situation de handicap peut bénéficier de tous les avantages sociaux d’un salarié par la signature d’un contrat de travail en CDI ou CDD : assurance chômage, sécurité sociale du régime général, retraite, mutuelle, prévoyance… Son activité est également protégée par la responsabilité civile et professionnelle souscrite par la société de portage salarial.
De plus, le dispositif du portage salarial lui permet de pouvoir se concentrer sur son cœur d’activité et le développement de son business. La société de portage se charge de réaliser toutes les démarches administratives, comptables, sociales et fiscales :
- Contractualisation avec les clients
- Facturation, recouvrement des règlements
- Edition des bulletins de salaire
- Gestion des notes de frais
- Paiement des cotisations sociales et fiscales
Grâce au portage salarial, le travailleur en situation de handicap indépendant peut proposer ses services sans avoir à créer de société avec toutes les contraintes liées à la création (immatriculation, coût d’enregistrement, coût d’annonce légale, coût des assurances et de l’expert-comptable…). Généralement, le coût de la société de portage est un pourcentage du chiffre d’affaires généré par le travailleur.
Enfin, ce dispositif est protecteur pour le travailleur en situation de handicap. Il est assuré de percevoir un salaire tous les mois travaillés, indépendamment des règlements de ses clients, contrairement à un statut de micro-entreprise (autoentrepreneur) ou d’entreprise individuelle.