Le monde du travail évolue et celui du freelancing est de plus en plus plébiscité pour diverses raisons : la liberté d’entreprendre, casser le schéma traditionnel du 8 heures par jour, choisir pour qui travailler voire varier les missions. À cela, s’ajoute à l’indépendant le choix de son statut juridique : la SASU, l’EURL, la micro-entreprise ou le portage salarial. Et très souvent, à l’instant T, le freelance ne pense pas immédiatement à sa retraite et encore moins à sa complémentaire.
Un sujet épineux aujourd’hui qui invite à se poser la question : quelle retraite selon le statut juridique ?
Actuellement, le nombre de trimestres exigé pour partir à la retraite à taux plein est de 172 trimestres pour les personnes nées en 1973 et de 168 trimestres pour celles nées entre 1961 et 1963 (détails des trimestres et des années de naissance).
Je suis en SASU
Vous avez choisi d’entreprendre seul en créant votre SASU, Société par Action Simplifiée Unipersonnelle. L’avantage est, qu’en tant que président de votre société unipersonnelle, vous avez la possibilité de vous salarier. Vous êtes alors assimilé-salarié niveau cadre. L’autre avantage est que vous êtes soumis à des cotisations sociales sur la base de votre rémunération brute, à l’exception de l’assurance chômage. Vous ne percevez pas d’allocations chômage mais vous cotisez au régime de la retraite.
Quelle retraite pour le Président de la SASU
Bonne nouvelle, la retraite de base et la retraite complémentaire font parties des cotisations sociales que vous (l’entreprise) versez à l’URSSAF en tant qu’assimilé-salarié. Ces cotisations sont directement prélevées mensuellement sur votre bulletin de salaire et sont calculées proportionnellement au montant de ce dernier. Mais attention, comme précisé ci-dessus, les cotisations sont liées au salaire : pas de salaire, alors pas de cotisations sociales, donc pas de validation de droits à la retraite. Si vous décidez de vous verser une rémunération uniquement sur la base de dividendes, sachez qu’ils ne permettent pas la validation de droits à la retraite.
Comme tout salarié dans le privé, vous cotisez à l’URSSAF. La retraite de base relève de la Sécurité sociale et la retraite complémentaire relève de l’Argic-Arrco, qui concerne la plupart des salariés de l’industrie, du commerce, des services et de l’agriculture. L’Argic-Arrco regroupe 12 caisses de retraite complémentaire. Pour connaître la vôtre, munissez-vous du numéro de SIRET de votre société et consultez la page de l’Agirc-Arco.
Je suis en EURL
Comme la SASU, l’Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée, est une entreprise individuelle constituée d’une seule personne dite “associée” qui peut être une personne physique (vous) ou morale. L’EURL est assimilée à une SARL classique toujours avec cette spécificité d’avoir un associé unique. La protection sociale et les cotisations retraite vont dépendre de votre statut, gérant associé-unique ou gérant non associé.
Je suis gérant associé unique
En tant que gérant associé unique, vous relevez du régime des Travailleurs non-salariés (TNS) et êtes affilié à la Sécurité Sociale des Indépendants (SSI) pour les artisans, commerçants, industriels. Depuis septembre 2021, la sécurité sociale des indépendants est gérée par l’Urssaf pour les cotisations, la caisse d’assurance maladie pour la santé et la caisse d’assurance retraite pour la retraite. Si vous exercez une profession libérale, votre retraite de base est gérée par la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professionnelles libérales (CNAVPL) et votre retraite complémentaire par une des 10 sections professionnelles. Enfin, si vous exercez la profession d’avocat, vous dépendez de la Caisse nationale des barreaux français (CNBF). Les exploitants agricoles sont rattachés à la Mutuelle sociale agricole (MSA).
En tant que travailleur non-salarié, vous versez une cotisation minimale que vous soyez rémunéré ou non. Vous versez également des cotisations sociales calculées sur la base du bénéfice de l’EURL si celle-ci est soumise à l’IR ou sur la base de votre rémunération si l’EURL est soumise à l’IS. A noter que vous ne bénéficiez pas de l’assurance chômage.
En tant que TNS, vous bénéficiez de la retraite de base et de la retraite complémentaire, toutes les deux obligatoires. La retraite de base est calculée sur la base de la durée de travail. La retraite à taux plein d’un travailleur non salarié est de 50%, vous percevez donc 50% de votre revenu moyen sur vos 25 meilleures années. Vos cotisations à la Sécurité Sociale des Indépendants vous permettent d’obtenir des points pour la retraite complémentaire. Pour calculer le nombre de points acquis, vous devez diviser le montant annuel de vos cotisations retraites par la valeur d’acquisition du point, qui peut varier d’année en année.
Comment sont validés les trimestres d’un gérant associé-unique ?
En tant que gérant associé-unique, vous êtes en TNS. Votre retraite de base dépend de votre durée travail. 600 x smic horaire brut valide 4 trimestres, 50 jours de pôle emploi valide 1 trimestre. En fonction de votre année de naissance, vous devez valider entre 160 et 172 trimestres pour obtenir votre retraite à taux plein.
Je suis gérant non associé
L’associé unique de l’EURL peut se nommer gérant ou bien confier cette fonction à une personne de son choix. Si vous êtes gérant d’une EURL sans être l’associé unique, vous avez le statut d’assimilé-salarié, à l’instar du Président d’une SASU. Vous cotisez à l’URSSAF, la retraite de base relève ainsi de la Sécurité sociale et la retraite complémentaire de l’Argic-Arrco. Tout comme le Président d’une SASU, vous ne cotisez pas à l’assurance chômage.
Comment sont validés les trimestres d’un gérant non associé-unique ?
En tant que gérant non associé-unique ou Président d’une SASU, vous êtes assimilé salarié. Pour pouvoir valider un trimestre, vous devez percevoir un revenu brut correspondant à 150 x le smic horaire brut soit 1.690,50 euros. 4 trimestres sur une année sont validés lorsque la rémunération est de 6 762 € brut minimum.
Je suis micro-entrepreneur
C’est la simplicité avant tout ! Vous bénéficiez du régime du micro-social simplifié qui vous permet de verser des cotisations sociales en fonction de votre chiffre d’affaires, de façon mensuel ou trimestriel. Vous êtes TNS et cotisez à la retraite de base et à la retraite complémentaire. Votre taux de cotisations varie selon votre activité. Contrairement au statut de gérant associé-unique où une cotisation minimale est obligatoire, que vous soyez rémunéré ou non, en tant que micro-entrepreneur, si vous ne réalisez pas de chiffres d’affaires, vous ne versez pas de cotisations donc pas de droit à la retraite.
Les caisses de retraite pour le micro-entrepreneur
Le micro-entrepreneur qui exerce une activité artisanale, commerciale ou industrielle cotise à la Cnav (régime général de la Sécurité sociale) pour la retraite de base et complémentaire. Le micro-entrepreneur qui exerce une activité libérale est rattachée à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (Cipav), suivant le métier de l’auto-entrepreneur.
Cependant, depuis 2018, les auto-entrepreneurs exerçant des professions libérales non réglementées tels que les consultants, graphistes, formateurs, etc. cotisent directement au SSI. La Cipav ne gère plus que 21 métiers contre 400 auparavant. La plupart des auto-entrepreneurs sont donc rattachés au SSI.
Comment sont validés les trimestres d’un micro-entrepreneur à la Cipav ?
Il est très simple de connaître le nombre de ses trimestres validés chaque année. Ils sont validés selon votre chiffre d’affaires cumulé sur une année civile.
Un barème de 4 paliers est défini qui sont en 2023 de :
- 2 571 € de CA pour le trimestre 1,
- 5 142 € de CA pour le trimestre 2,
- 7 713 € de CA pour le trimestre 3,
- 10 284 € de CA pour le trimestre 4.
Aucun trimestre n’est acquis pour un chiffre d’affaires inférieur à 2 571 €
Comment est calculé le montant de la pension de retraite de base d’un micro-entrepreneur à la Cipav ?
Attention, la validation des trimestres ne détermine pas le montant de votre pension mensuelle lorsque vous partirez à la retraite. Le montant de votre retraite de base est calculé à partir du nombre de points cumulés durant toute votre carrière (attention ces points son propre au régime de base et non au régime complémentaire) multiplié par la valeur du point (qui est revu chaque année).
Par exemple*
- Vous avez cumulé 9 000 points de retraite de base durant toute votre carrière et décidez de partir à la retraite en 2023.
- Vous devez prendre en compte la valeur annuelle du point défini pour l’année 2023 :
- 9 000 points x 0,6076 € valeur d’un point = 5 468,40 €
Dans ce cas simulé, le montant annuel de votre pension de retraite de base est donc de 5 468,40 € soit 455,70 € par mois.
Comment est calculé le nombre de points acquis dans le régime de base pour le micro-entrepreneur à la Cipav ?
Les taux* ci-dessous sont à prendre en compte pour calculer vos points acquis pour votre régime de base :
Votre taux de cotisation sociale forfaitaire Cipav sur votre chiffre d’affaires : 21,20 %
Cela veut dire que 31,30% (tranche 1 + tranche 2) des 21,20% de votre forfait de cotisation social sont dédiés à votre régime de base.
Exemple* de calcul dont le chiffre d’affaires annuel est de 11 000 € pour 2022
- Notez qu’ici 4 trimestres sont validés car le chiffre d’affaires de 11 000 €
- Il est supérieur au seuil minimal attendu de 10 284 € pour 4 trimestres d’une année civile.
Comment est calculé le nombre de points de la retraite complémentaire pour le micro-entrepreneur à la Cipav ?
Conservant l’exemple d’un chiffre d’affaires annuel de 11 000 €*, le calcul prend en compte trois facteurs :
- le taux de la cotisation sociale forfaitaire : 21,20%
- le taux de la retraite complémentaire : 20,75%
- le coût d’un point de cotisation : 45,30 €
Comment sont validés les trimestres d’un micro-entrepreneur à la SSI ?
À la SSI, vous cotisez à la CNAV. Vos trimestres ne dépendent pas des paliers à atteindre contrairement à la Cipav. Il existe ici un calcul pour déterminer le nombre de trimestres validés en fonction de votre chiffre d’affaires annuel.
Les deux tableaux** suivants « Taux de cotisations sociales » et les « Taux de la retraite de base et de la retraite complémentaire », et le « Taux de cotisation vieillesse des travailleurs indépendants classiques » à 17,75 % sont à prendre en compte pour les calculs par rapport à votre activité et le fait qu’elle soit cataloguée BIC (bénéfices industriels et commerciaux) ou BNC (bénéfices non commerciaux).
Exemple** de calcul de votre activité de prestation de services catalogué BIC dont votre chiffre d’affaires annuel est de 10 000 €
Comment est calculé le nombre de points de la retraite complémentaire pour le micro-entrepreneur au SSI ?
Le calcul est déterminé par trois facteurs pour connaître le nombre de points :
- Le montant des cotisations globales
- Le taux de la retraite complémentaire : 16,50% (chiffre de 2023)
- La valeur d’acquisition d’un point : 19,394 € (chiffre de 2023)
Conservant l’exemple du chiffre d’affaires annuel de 10 000 €**, le montant des cotisations globales est de 2 120 €. Le calcul des points revient à :
Je suis en portage salarial
SASU, EURL ou micro-entreprise, vous comprenez que ces statuts vous incombent toutes les parties administratives. Et même si vous faites appel à un cabinet comptable pour vous aider, vous devrez tout de même mettre les mains dans le “cambouis”. Ce temps-là n’est pas mis à profit dans l’exercice de votre activité ou pour trouver de nouveaux clients. Par ailleurs, vous avez saisi que pour prétendre à une pension de retraite, il faut s’acquitter des cotisations sociales.
Ainsi, en portage salarial, vous bénéficiez immédiatement des avantages sociaux d’un salarié du privé : les cotisations au régime de l’assurance chômage, de la caisse de retraite de base de la Sécurité sociale et à la caisse de retraite complémentaire régi par l’Agirc-Arrco.
En tant que porté, assimilé à un salarié du privé, le montant de la pension pour la retraite de base est calculé de la même façon :
- à partir de la moyenne de vos revenus des 25 meilleures années,
- sur le nombre de trimestres cotisés au moment du départ à la retraite
La formule du calcul de votre retraite est expliquée 👉 ici par l’Assurance Retraite de la Sécurité sociale.
Un comparateur de statut juridique et du montant de votre retraite ?
L’URSSAF a mis à disposition un comparateur qui vous permet d’avoir une estimation sur votre pension-retraite selon la nature de votre activité principale (artisanale, commerciale ou libérale), votre statut juridique (SASU, EURL ou micro-entreprise), votre chiffre d’affaires et de vos charges estimés.
Faites votre simulation 👉 ici.
Derniers conseils pour bien préparer votre retraite
Vous êtes arrivé au bout de l’article, il ne reste plus qu’à vous donner les derniers conseils pour préparer au mieux votre dossier retraite :
- Votre pension de retraite est proportionnelle au revenu de votre activité.
- Conservez vos bulletins de salaires qui vous seront demandés en tant que justificatif lorsque vous ferez votre demande de retraite.
- Pensez à épargner de votre côté pour compléter votre retraite, exemple une assurance vie, le PEE/PERCO…
- Quel que soit votre statut, vous avez accès à votre compte personnel “retraite” sur le site lassuranceretraite.fr.
* source CIPAV
** source BPI France